S c i e n c e e t A
Par le Dr Jean-Charles Duclos-Vallée*, maître de conférences des universités,
praticien hospitalier, hôpital Paul-Brousse à Villejuif. Chez les patients co-infectés VIH-VHC, l’infection par le VIH aggrave l’évolution de l’hépatite C. La prise en charge de l’hépatite chronique C a considérablement évolué depuis plusieurs années, en particulier grâce à l’utilisation de l’interféron pégylé et de la ribavirine. Néanmoins, il s’agit d’une prise en charge volontiers longue et difficile, qui ne peut être bien conduite que par une équipe pluridisciplinaire. * Contact : Jean-Charles Duclos-Vallée, Département des maladies du foie, Centre hépato-biliaire et unité Inserm, hôpital Paul-Brousse, 94804 Villejuif. Epidémiologie Tél. : 01 45 59 34 36. Fax : 01 45 59 38 57. E-mail : jean-charles.duclos-vallee@pbr.ap-hop-paris.fr
La prévalence de l’infection virale C est plusimportante chez les malades infectés par le VIH(25 à 30 %) que dans la population générale
l’hémorragie digestive, l’ascite, l’encéphalopa-
(1 %). Elle est particulièrement élevée (environ
thie hépatique et, enfin, l’insuffisance hépatique
80 %) chez les patients hémophiles infectés par
sévère, qui peut être très rapide en cas de co-
le VIH qui ont été exposés au risque transfu-
infection VIH-VHC. L’infection par le VIH
sionnel avant l’introduction des procédures
expose aussi à la survenue plus précoce du cancer
d’inactivation virale et le dépistage systémati-
primitif du foie (ou carcinome hépatocellulaire).
que des dons du sang. En outre, cette prévalence
Rappelons que dans plusieurs enquêtes françai-
est corrélée à la sévérité des troubles de la
ses successives, et à partir de grandes cohortes
coagulation : le nombre de transfusions ou d’in-
de patients infectés par le VIH, la mortalité par
jections de produits antihémophiliques implique
atteinte hépatique est passée de 0,4 % à 14,4 %
une plus forte exposition à l’infection par le
Histoire naturelle
IPlace des méthodes non invasives et de la biopsie pour évaluer l’atteinte hépatique L’impact de l’infection virale C sur l’histoire naturelle du VIH
La quantification de la fibrose hépatique est très
La plupart des études n’ont pas montré d’in-
importante pour la prise en charge des malades
fluence significative du VHC sur la progression
atteints d’hépatite chronique C ; elle inter-
de l’infection par le VIH. Mais il a été suggéré
vient dans les différentes recommandations
que les patients co-infectés, notamment les
thérapeutiques. Chez les patients infectés par le
patients hémophiles touchés par le génotype 1b,
VIH, il est fondamental, compte tenu de la pro-
pouvaient subir une évolution plus sévère de
gression plus rapide de la fibrose, d’instituer une
surveillance régulière et rapprochée. Si l’évaluation de la fibrose hépatique a été
L’influence de l’infection VIH
jusqu’à présent fondée sur la biopsie hépatique,
sur l’histoire naturelle
de nombreuses méthodes alternatives non
le pourcentage d’hos-pitalisations est nette-de l’hépatite chronique C
invasives ont été développées pour quantifier
L’infection par le VIH accélère l’évolution des
notamment la fibrose et l’inflammation. les patients co-infectés(31 %) que chez les
lésions du foie, en particulier la progression de la
Concernant la co-infection, ces méthodes non
fibrose hépatique. Elle favorise l’apparition
invasives méritent des études complémentaires
d’une cirrhose et de ses complications telles que
H é m o p h i l i e • D é c e m b r e 2 0 0 5
S c i e n c e e t m é d e c i n e
La biopsie hépatique doit être pratiquée « au cas
La bithérapie interféron-ribavirine
par cas » et réservée aux patients pour lesquels
Concernant la co-infection VIH-VHC, trois
l’efficacité du traitement peut être mise en
essais principaux, dont un français3, montrent
doute, notamment ceux qui sont infectés par le
que l’association interféron pégylé-ribavirine
génotype 1b. Elle peut aussi être proposée
est nettement plus efficace que la bithérapie
lorsqu’il existe d’autres comorbidités, telles
interféron standard-ribavirine : le taux de
qu’une consommation d’alcool importante, ou
réponse virologique prolongée est de 27 à 40 %
bien lorsqu’on soupçonne la trithérapie antiré-
avec l’interféron pégylé, contre 12 à 19 % avec
trovirale d’être toxique pour le foie.
De nombreux centres refusent d’effectuer une
En cas d’infection par un génotype 1, le traite-
biopsie hépatique chez les patients hémophiles
ment est moins efficace. Là aussi, la supériorité
en raison du risque hémorragique potentiel.
de la bithérapie interféron pégylé-ribavirine est
Cependant, le risque d’apparition de complica-
démontrée, avec un taux de réponse virologique
tions est faible, voire nul, si la biopsie hépatique
prolongée de 14 à 30 % (versus 5 à 7 % avec
est pratiquée par voie transjugulaire2 et enca-
l’interféron standard). La durée du traitement est
drée par l’administration de facteurs de coagu-
lation. Elle n’est pas recommandée lorsqu’il
En revanche, à ce jour, les deux formes disponi-
existe un anticoagulant circulant, ou inhibiteur.
bles d’interféron pégylé (Peg-2a ou Peg-2b) ontune efficacité équivalente (27 % de taux de
Le traitement de l’hépatite aiguë C
réponse virologique prolongée dans les deuxcas).
L’hépatite aiguë C est diagnostiquée quand
Si l’association interféron pégylé-ribavirine
l’inflammation est récente ; la phase aiguë
entraîne environ un tiers de réponses virolo- giques complètes, elle peut être responsable,
dans un tiers des cas, d’un arrêt du traitement,
en raison de l’apparition d’effets secondaires. Il
s’agit essentiellement d’anémie, de neutropénie,
de fatigue importante et de syndromes dépres-
sifs. Il est donc nécessaire d’encadrer la théra-
peutique antivirale C d’un arsenal d’autres
thérapeutiques, telles que les facteurs de crois-
ment contre le VIH, ou trithérapie.
sance4 et les antidépresseurs, sous le contrôle
d’une prise en charge multidisciplinaire.
Comme chez les patients mono-infectés, les
patients co-infectés VIH-VHC qui n’ont pas de
réponse virologique précoce (après trois mois
peut entraîner une gêne respiratoire.
de traitement) ont une chance de réponse virolo-
gique prolongée pratiquement nulle. Aussi, en
(ponction biopsie hépatique) :cet examen anatomopathologique
I Le traitement de
l’absence de réponse virologique précoce, il n’est
l’hépatite chronique C
pas justifié de maintenir une bithérapie.
consiste à prélever un fragment defoie, qui est mis en culture pendant
Les interactions avec la trithérapie
un mois. Il permet d’évaluer le degré
L’association d’interféron pégylé et de ribavirine
n’a pas d’impact négatif sur le contrôle de l’in-
fection par le VIH. Mais avec l’emploi des
antirétroviraux, un risque élevé de toxicité
mitochondriale, représentée par un taux impor-
tant d’acide lactique dans le sang (acidose lacti-
que), a été observé. Il est lié à l’interaction entre
la ribavirine et la didanosine ou la stavudine,
d’obtenir une réponse virologi-
deux molécules utilisées dans la trithérapie. que prolongée chez environ
Celles-ci doivent être évitées avant le démarrage
d’un traitement par interféron pégylé et ribavi-rine. En outre, la zidovudine (autre molécule
12 H é m o p h i l i e • D é c e m b r e 2 0 0 5 Les stades de la maladie Quand l’inflammation est Si l’inflammation dure Processus de cicatrisation Affection grave du foie entraînant récente, on parle d’une depuis plus de six mois, du foie en réponse à une des anomalies de fonctionnement. hépatite aiguë. La phase on parle d’hépatite agression, du VHC par L’évolution vers la cirrhose peut se aiguë survient de quatre chronique. exemple. Le stade de faire sur vingt à trente ans. à douze semaines après la fibrose est évalué par une contamination. échelle allant de 0 à 4 Cirrhose compensée : le foie continue (F0 à F4). Au stade F4, à assurer l’essentiel de ses fonctions. Cirrhose décompensée : le foie on parle de cirrhose. n’assure plus du tout ses fonctions. Descomplications importantes apparaissent(hémorragie digestive, troubles neurolo-giques…) et nécessitent une prise encharge médicale d’urgence.
utilisée dans la trithérapie) est elle aussi contre-
réponse, il est possible de recourir à des traite-
indiquée, du fait du risque accru d’anémie et de
ments antifibrosants, dont l’efficacité est en
cours d’évaluation. Il est fondamental, à ce stade, de rechercher une
La surveillance et le suivi
hypertension portale par une endoscopie diges-
La surveillance du traitement et le suivi doivent
tive et d’instituer éventuellement un traitement
être presque hebdomadaires lors du premier
préventif par bêtabloquants. Le dépistage du
mois de traitement, et, par la suite, mensuels.
carcinome hépatocellulaire doit être réalisé par
Leur augmentationtémoigne d’une atteinte
Cette surveillance est constituée d’un examen
une échographie de qualité tous les six mois. Un
clinique et de tests sanguins (numération for-
suivi hépatologique clinique et rapproché, tous
mule sanguine, transaminases5). Une quantifi-
les trois mois, est impératif, afin de dépister et
cation virale doit être pratiquée douze semaines
de traiter précocement les complications repré-
ou acide ribonucléique)dans le sang. Dans ce
sentées par un ictère, une ascite et des œdèmes
Chez certains patients, malgré une diminution
dans le sang a beaucoupbaissé, mais le génome
significative de la quantification virale, celle-ci
reste positive qualitativement6. Dans ce cas, la
réponse virologique soutenue doit être établie par la pratique d’un test qualitatif vingt-quatre semaines après la fin du traitement. Les différentes réponses Chez les patients hémophiles au traitement antiviral
La conduite thérapeutique du traitement doitêtre guidée par les modalités de traitement pré-
Réponse virologique précoce : la quantification virale (mesure
conisées chez les patients non hémophiles.
du virus dans le sang) diminue de manière significative (de 2log10)après seulement trois mois de traitement.
I Quand l’hépatite C Non-réponse : la quantification virale reste stable sous a évolué en fibrose
Devant une fibrose sans cirrhose (F1-F2), il est
Réponse virologique complète : la recherche du VHC dans
important d’instituer un traitement antiviral, en
le sang est négative sous traitement.
maintenant des posologies importantes d’inter-
Réponse virologique prolongée : la recherche du VHC dans
féron pégylé et de ribavirine, notamment au
le sang est négative six mois après l’arrêt du traitement.
cours des trois premiers mois de traitement.
Réponse virologique soutenue : la recherche du VHC
Pour une fibrose sévère, en particulier lors
dans le sang est négative vingt-quatre mois après l’arrêt du
d’une cirrhose compensée, il faut aussi mettre
en place le traitement antiviral. En cas de non-
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S c i e n c e e t m é d e c i n e
I La place de la transplan- guré ce programme en 2000 avec l’appui de tation hépatique
l’ANRS7, sont très encourageants. Toutefois,deux problèmes persistent après la greffe : d’une
part, la récidive de l’infection virale C potentiel-
lement sévère ; d’autre part, la toxicité mito-
appelées génotypes (eux-mêmes divisés en sous-types : a, b…).
chondriale des antirétroviraux sur le greffon. La
récidive de l’infection virale C reste un problème
essentiel et oblige à reprendre un traitement
antiviral le plus tôt possible après la greffe.
Enfin, il faut noter qu’en cas d’hémophilie, la
transplantation hépatique apporte le bénéfice
essentiel de corriger l’anomalie de coagulation8.
coagulation sont principale-ment synthétisés par le foie.
Ictère : coloration jaune de la peauet des muqueuses due à l’excès debilirubine dans le sang ; « jaunisse ». Jean, hémophile et transplanté
Interféron : médicament antiviral. Apparu en 2001, l’interféron
Jean1, hémophile A atténué, vit en Bretagne. En 2002, il a subi une transplantation du foie. Il a été pris en charge par l’équipe médicale des CHU de Brest et de Rennes2.
une durée d’action et une efficacitéplus importantes que l’interféronstandard. Une injection hebdoma-
En 1991, à l’âge de 30 ans, Jean apprend qu’il a été contaminé par le VIH et le VHC.
Quelques années plus tard, il entame une trithérapie pour lutter contre le VIH. A partir de
2000, l'hépatite C évolue de manière critique. A ce stade de la maladie, Jean ne peut pasrecevoir de traitement antiviral car celui-ci ne présente que de faibles chances de réponse ;
il risquerait surtout d’être très mal toléré par le foie et d’aggraver la fonction hépatique.
Début 2002, son état se dégrade brutalement ; ses jambes se couvrent d’œdèmes très dou-
loureux. Jean atteint très vite un état de cirrhose virale décompensée. Il ne lui reste plus
qu’une solution : la transplantation, avec tous les risques qu’elle comporte. Cette option lui
est proposée au mois d’avril 2002. Jean, qui se sait condamné, accepte.
Le 15 juillet, il est opéré au CHU de Pontchaillou à Rennes. A l’issue de l’intervention, Jean
n’est pas au bout de ses peines ; il fait un rejet du greffon et contracte une infection noso-comiale pulmonaire. Un soulagement cependant : dès le lendemain de l’opération, les
Après trois semaines passées dans le service de réanimation chirurgicale, Jean est sauvé. En
Aujourd’hui, à 45 ans, après trois ans en arrêt maladie, Jean est reconnu invalide à 80 %.
infection bactérienne peut survenir.
S’il ne peut plus faire d’efforts, en raison d’une masse musculaire diminuée, il est tout à faitmobile et se sent beaucoup mieux qu’avant la greffe. La dépression qui l’avait accablé
pendant des années, après sa contamination, a disparu. Se définissant comme un « rescapé
heureux », il profite de chaque instant. Il ne prend qu’un seul antirejet par semaine, la
de gélules à prendre tous les jours.
trithérapie faisant, en quelque sorte, office d’antirejet. Et, comme tous ceux qui reçoivent un nouveau foie, il n’est plus hémophile. Un change-
ment qui l’a fortement perturbé. Après s’être éloigné de l’Association française des hémo-
philes, il est à nouveau adhérent. « L’hémophilie fait partie de mon identité », explique-t-il.
saire aux cellules. Les antirétrovirauxpeuvent atteindre leur fonction, en
2• Jean a été suivi par une équipe expérimentée : le Pr Nousbaum,hépatologue à Brest, le Pr Garré, infectiologue à Brest, le Dr Camus, infectiologue à Rennes, et le Pr Boudjema, chirurgien,qui a réalisé la transplantation.14 H é m o p h i l i e • D é c e m b r e 2 0 0 5
ABOUT DATAMONITOR HEALTHCARE About the Cardiovascular and Metabolic pharmaceutical 2 analysis team CHAPTER 1 EXECUTIVE SUMMARY Strategic scoping and focus Datamonitor insight into the disease market Related reports CHAPTER 2 MARKET DEFINITION AND OVERVIEW Definition of drug classes Current seven major market assessment The antidiabetics market segmented by c
Medical data is for informational purposes only. You should always consult your family physician, or one of our referral physicians prior to treatment. tients from angina, claudication, and dizziness. However with longterm and extensive use the benefits of chelates are lost with thenonspecific removal and reduction of the essential trace metals. Chelation therapy can be a double edge sword li